En pleine crise politique en France, Emmanuel Macron devait entreprendre, jeudi 29 et vendredi 30 août, un déplacement sensible en Serbie. Même si l’Elysée garde une prudence extrême sur les raisons de cette visite au timing étonnant – un briefing avec la presse, annoncé mardi, a été reporté à la dernière minute sans explication –, le président français pourrait bien profiter de sa rencontre avec son homologue serbe, prévue jeudi soir, pour annoncer la concrétisation d’un contrat de vente de douze avions de chasse Rafale à Belgrade.
« Nous travaillons sur ce contrat depuis plusieurs jours », a confirmé le président serbe Aleksandar Vucic sur la chaîne Pink TV, lundi 26 août, en évoquant aussi des accords sur « l’électricité » avec EDF, alors que la Serbie envisage de relancer son industrie nucléaire. M. Macron est aussi annoncé, vendredi, à Novi Sad, deuxième ville du pays, pour visiter un musée et un forum économique consacré à l’intelligence artificielle, mais ce sont bien les Rafale qui suscitent le plus d’intérêt en Serbie, alors que l’armée serbe ne détient jusqu’ici que des vieux Mig-29 soviétiques.
M. Vucic, qui s’est rendu déjà deux fois à Paris cette année, promet depuis des mois que le contrat avec Dassault, évalué à 3 milliards d’euros, est quasiment bouclé. La partie française, en revanche, est restée nettement plus discrète sur le sujet. L’exportation de Rafale dans ce pays réputé pour sa proximité avec Moscou et ses visées parfois belliqueuses sur ces voisins balkaniques, pose en effet de nombreuses questions.
Comment la France compte-t-elle garantir que les technologies du Rafale ne seront pas transmises en Russie ou utilisées pour faire pression sur le Kosovo voisin, dont Belgrade ne reconnaît toujours pas l’indépendance ? Depuis des mois, Paris se garde bien de répondre, tout en se montrant particulièrement soucieux de défendre la partie serbe dans les différends qui se multiplient avec Pristina dans le nord du Kosovo, toujours majoritairement peuplé de Serbes qui refusent de vivre sous la souveraineté des Albanais.
Ancrage européen mis en doute
Même si les conseillers d’Emmanuel Macron assurent souvent que le chef de l’Etat n’est pas dupe des dérives de M. Vucic, qui dirige son pays de 6,6 millions d’habitants d’une main de fer depuis 2012 en stoppant quasiment toutes les réformes requises pour adhérer à l’Union européenne, force est de constater que le président français affiche régulièrement sa sympathie pour ce géant de 2 mètres qui adore manier la diplomatie transactionnelle avec les grandes puissances, que ce soit la Russie, la Chine ou l’Occident.
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