- Un avocat a apporté un rat, ce mardi, lors d’une audience de prolongation de la détention provisoire de son client devant le tribunal de Paris.
- Un geste pour dénoncer les « conditions d’hygiène déplorables » dans les prisons françaises.
C’est un invité que le tribunal de Paris n’attendait pas. Las des « conditions d’hygiène déplorables »
dans lesquelles vivent les détenus dans les prisons françaises, un avocat a apporté un rat, mardi 15 juillet, lors d’une audience de prolongation de la détention provisoire de son client. « Je ne suis pas venu tout seul »
, a déclaré Me Romain Boulet en s’approchant du juge des libertés et de la détention (JLD). « Voici Marie-Madeleine, que j’ai attrapée ce matin sur le parking de la maison d’arrêt de Nanterre »,
a poursuivi l’avocat, sous les regards éberlués du magistrat et de la procureure de la République.
À la barre, il a expliqué sa démarche peu orthodoxe par ses nombreuses procédures infructueuses engagées pour dénoncer l’indignité des conditions de détention de ses clients (nouvelle fenêtre) et auxquelles l’administration répond systématiquement qu’il « ne présente pas assez de preuves »
. « Je n’ai pas le droit d’entrer en prison avec un appareil photo. Je ne peux pas vous montrer à quoi ressemble une cellule, le mur des douches recouvert d’excréments »
. « Alors voilà, je suis venu avec Marie-Madeleine »
, a souri l’avocat.
Une densité de 165,6% en maison d’arrêt
Au 1ᵉʳ juin 2025, le nombre de détenus dans les prisons françaises était de 84.447 (nouvelle fenêtre) pour 62.566 places opérationnelles, selon les données du ministère de la Justice. La densité carcérale atteint 165,6% en maison d’arrêt, où sont incarcérés les détenus en attente de jugement, donc présumés innocents, et ceux condamnés à de courtes peines. En plus du problème récurrent de surpopulation, les prisons françaises souffrent de vétusté, régulièrement dénoncée par des associations, par la contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL) (nouvelle fenêtre), ou encore des avocats.
La France a été condamnée en 2020 par la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) (nouvelle fenêtre) pour traitements inhumains et dégradants en prison. Avec son rat, Me Boulet a poursuivi son combat : Marie-Madeleine est porteuse « d’au moins quatre maladies : la variole du singe, l’hépatite, la toxoplasmose et la leptospirose. Si j’ouvrais sa boîte ici, on évacuerait immédiatement la salle. Et pourtant les détenus vivent avec et il ne se passe rien »,
a-t-il déploré.
Au terme des délibérations, le juge des libertés et de la détention n’a pas demandé la prolongation de la détention de son client qui sera soumis à un contrôle judiciaire à sa sortie de la maison d’arrêt de Nanterre à la fin du mois. « Maître, qu’allez-vous faire du rat ? »,
s’est inquiété le magistrat avant de quitter la salle.