Près de trois ans après l’implosion de sa startup, Alexander Mashinsky, fondateur et ancien patron de la plateforme de cryptomonnaies Celsius, a été condamné, jeudi 8 mai, par un juge fédéral de Manhattan à douze ans de prison pour fraude.
L’homme de 59 ans avait plaidé coupable, début décembre, de fraude sur titres financiers, ce qui lui a évité un procès et qui a permis de limiter les charges qui pesaient contre lui.
La procureure adjointe Allison Nichols a présenté Alexander Mashinsky comme un prédateur financier, déclarant qu’il avait trompé les clients dès le début en exagérant la capacité de Celsius à créer des profits. « Il s’est nourri de l’espoir, a-t-elle déclaré. Mashinsky savait exactement ce qu’il faisait : vendre de l’espoir à ces gens. »
La plateforme offrait à ses clients de placer leurs cryptomonnaies, en échange d’intérêts, et aussi d’acheter la propre devise numérique de l’entreprise, le CEL. Selon l’accusation, les dirigeants de Celsius ont ponctionné plus de quatre milliards de dollars dans les actifs des clients pour financer, entre autres, le fonctionnement de la société, réaliser des investissements à hauts risques et des prêts sans garanties.
L’ancien patron était aussi poursuivi pour avoir manipulé le cours du CEL, notamment en utilisant, à leur insu, des fonds déposés par des clients pour acheter la devise et gonfler artificiellement son cours.
« L’intérêt présenté par l’utilisation des actifs numériques est réel, mais cela n’autorise pas à tromper » les clients, a commenté Jay Clayton, procureur fédéral de Manhattan, cité dans un communiqué.
Plus de 4,7 milliards de dollars rendus inaccessibles
Plusieurs victimes ont pris la parole lors de l’audience de détermination de la peine. Cameron Crewes, qui fait partie d’un comité de victimes, a appelé à une « peine sévère », affirmant que près de 250 victimes sont mortes avant de pouvoir voir justice rendue ou d’être correctement indemnisées pour leurs pertes. « Beaucoup de gens ont été anéantis », a-t-il déclaré.
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Au faîte de sa popularité, fin 2021, Celsius comptait plus d’un million de clients et revendiquait plus de 25 milliards de dollars d’actifs investis sur la plateforme. Mais la crise qui a suivi la chute de la monnaie numérique Terra (UST), au printemps 2022, a fait souffler un vent de panique sur le marché des cryptomonnaies et a entraîné des retraits massifs sur plusieurs plateformes.
La défense a imputé la chute de Celsius à un « effondrement cataclysmique » des marchés des cryptomonnaies, et a affirmé que les actes de son client « n’ont jamais été prédatrices, exploiteuses ou vénales. Il n’a jamais agi avec l’intention de nuire à qui que ce soit. »
Pris dans la tourmente, Celsius a décidé, mi-juin 2022, de geler les avoirs avant de déposer le bilan un mois plus tard. A l’époque, plus de 4,7 milliards de dollars avaient été rendus inaccessibles. Selon un rapport d’étape publié fin mars, environ 93 % des fonds gelés ont été recouvrés et redistribués aux anciens clients.
Un secteur bouleversé par la crise des cryptomonnaies
Avant d’être condamné, M. Mashinsky a sangloté à plusieurs reprises en s’excusant auprès des clients et en évoquant son passé difficile alors que sa famille avait quitté une petite ville ukrainienne de l’ex-Union soviétique avec l’aide des États-Unis alors qu’il avait 7 ans. Installé en Israël, Alexander Mashinsky a servi trois ans dans les forces de défense israéliennes en tant que pilote de chasse avant de venir en Amérique.
Il a assuré n’avoir « jamais voulu blesser qui que ce soit ici, après tout ce que ce pays a fait pour [lui] ». « Je suis vraiment désolé », a-t-il déclaré, se décrivant comme quelqu’un « qui est parti de rien ».
Une série d’acteurs des cryptomonnaies ont été emportés par la lame de fond de 2022, notamment FTX, deuxième plus importante plateforme mondiale d’échanges au moment de son dépôt de bilan, en novembre de la même année.
Cette crise a engendré un contrecoup pour le secteur, en quête de crédibilité pour attirer les investisseurs institutionnels et les particuliers. Il a depuis été relancé par plusieurs décisions de justice favorables et par l’arrivée au pouvoir de Donald Trump, décidé à ouvrir la voie aux monnaies numériques.
