Cieran Perry, conseiller municipal de Dublin, a donné rendez-vous à Cabra Cross, un imposant carrefour dans le nord de la capitale irlandaise. Ce 29 février, et comme tous les jeudis soir depuis octobre 2023, il mène une manifestation de quartier en soutien à la Palestine. La nuit tombe, cela sent fort les gaz d’échappement et la friture du McDonald’s voisin. Pourtant, l’ambiance bat son plein : une vingtaine d’habitants des environs – des couples avec enfants, des retraités chien en laisse – ont sorti de grands drapeaux palestiniens qu’ils agitent au bord de la route. Ils ont aussi déroulé une bannière barrée d’un « Stop Israeli Terror in Gaza » (« stop à la terreur israélienne à Gaza »). Les automobilistes répondent par des concerts de klaxon.

D’un abord très sympathique, Cieran Perry, 61 ans, qui fustige le « génocide » en cours à Gaza, ne s’embarrasse pas de périphrases. « Pourquoi sommes-nous si nombreux à soutenir les Palestiniens ? C’est simple. Il y a un lien historique entre la Palestine et l’Irlande : nous avions le même oppresseur, l’Empire britannique, et la même politique d’occupation », assure cet élu sans étiquette qui se revendique de gauche. Cerena O’Brien, une habitante du quartier de Cabra postée au bord de la route avec son drapeau palestinien, déroule le même argument que Cieran Perry : « Nous aussi, nous avons connu l’oppression et la famine. »

L’Irlande est l’un des pays européens les plus propalestiniens. Dès le 18 octobre 2023, onze jours après les massacres commis par le Hamas en Israël, qui a répliqué en bombardant la bande de Gaza, le gouvernement de coalition de centre droit (allié aux Verts) a appelé à un « cessez-le-feu humanitaire immédiat ». Et a refusé de couper les dotations à l’UNRWA, l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens, après les allégations d’Israël accusant douze de ses membres d’avoir participé aux attaques du 7 octobre.

Le président irlandais, Michael D. Higgins, a vertement critiqué le « soutien inconditionnel » de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, à Israël, estimant qu’elle ne parlait pas « au nom de l’Irlande ». Et Dublin n’a pas exclu de s’associer à la plainte pour génocide déposée par l’Afrique du Sud contre Israël auprès de la Cour internationale de justice. « Le gouvernement ne soutenait pas autant la Palestine en octobre, mais il a évolué pour mieux refléter le sentiment national », analyse Cieran Perry. Selon un sondage publié le 2 février par l’institut Ireland Thinks, 79 % des Irlandais estiment en effet que « les actions militaires ­d’Israël à Gaza constituent un génocide ».

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