Un jour, on plaide pour l’histoire sous l’œil de la terre entière ; deux mois plus tard, on plaide pour un chirurgien qui a fraudé l’Urssaf sous l’œil mi-clos de trois quidams devant le tribunal correctionnel de Coutances (Manche). Un jour, on plaide pour changer la société ; un autre, pour obtenir la relaxe d’un second couteau dans une affaire de contrats d’assurance bidons vendus à des chauffeurs de VTC dans une salle vide de la cour d’appel de Paris. Pour ses audiences de reprise, Stéphane Babonneau, 42 ans, l’un des deux avocats de Gisèle Pelicot, était bien loin d’Avignon et du procès des viols de Mazan.
Pendant ce temps, le second avocat, Antoine Camus, 46 ans, quelques semaines après ses raisonnements devant la cour criminelle du Vaucluse sur la notion de consentement et la nécessaire évolution des mentalités, s’opposait à une mesure d’instruction in futurum de l’article 145 du code de procédure civile dans le cadre d’un conflit entre associés à la tête d’une société de gestion de portefeuilles d’actifs immobiliers (si on a bien compris). Mazan était le premier procès pour viol de ce spécialiste du contentieux des affaires, qui ne fait du pénal de droit commun qu’à la marge. Il a depuis retrouvé sa routine : dirigeants d’entreprise, guerres de gouvernance, gros enjeux financiers. Sans haie d’honneur à l’entrée du tribunal ni forêt de caméras à la sortie.
Antoine Camus était une connaissance d’une connaissance de Gisèle Pelicot, alors en quête d’un avocat. Il avait tout de suite accepté ce dossier trop lourd à porter seul et embarqué avec lui son ami Stéphane Babonneau, davantage rompu aux joutes des assises. Pendant près de quatre mois, les deux confrères ont été au centre du monde judiciaire. Les voilà redevenus simples robes noires parmi les robes noires, chacun dans son coin – vision étrange, tant le duo semblait inséparable –, replongés sans transition dans le quotidien des prétoires et les dossiers obscurs qui font tourner leur cabinet, boulevard Saint-Germain pour Me Babonneau, sur les Champs-Elysées pour Me Camus.
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