L’expulsion de l’imam Mahjoub Mahjoubi, jeudi 22 février, a-t-elle été permise par la nouvelle loi « immigration » ? C’est ce qu’a mis en avant le ministre de l’intérieur sur le réseau social X. « “L’Imam” radical Mahjoub Mahjoubi vient d’être expulsé du territoire national, moins de 12 heures après son interpellation, y a déclaré Gérald Darmanin. C’est la démonstration que la loi Immigration, sans laquelle une telle expulsion aussi rapide n’aurait pas été possible, rend la France plus forte. »

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L’arrêté d’expulsion de l’imam tunisien, que Le Monde a pu consulter, n’avait pourtant pas besoin de la nouvelle loi pour être rédigé. Pour le fonder juridiquement, le ministère de l’intérieur s’est en effet appuyé sur l’article L. 631-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda). Ce dernier prévoit que les étrangers d’ordinaire inexpulsables – notamment parce qu’ils sont arrivés avant l’âge de 13 ans en France ou parce qu’ils y résident depuis plus de dix ans et sont parents de Français mineurs (ce qui était le cas de M. Mahjoubi) – ne sont plus protégés en cas de « comportements de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de l’Etat, dont la violation délibérée et d’une particulière gravité des principes de la République énoncés à l’article L. 412-7, ou liés à des activités à caractère terroriste, ou constituant des actes de provocation explicite et délibérée à la discrimination, à la haine ou à la violence contre une personne déterminée ou un groupe de personnes ».

La mention de la violation des « principes de la République » est un ajout de la loi « immigration » et, dans son arrêté d’expulsion, le ministère de l’intérieur l’impute à l’imam de 51 ans qui officiait à la mosquée Attawba de Bagnols-sur-Cèze (Gard). Mais lui est aussi imputée de façon détaillée « la provocation explicite et délibérée à la discrimination, à la haine ou à la violence ». De sorte que, même sans l’apport de la nouvelle loi, l’administration avait de quoi fonder son arrêté.

De la même manière, le fait d’avoir recouru à une expulsion « en urgence absolue », c’est-à-dire sans passer devant une commission d’expulsion, n’est pas une possibilité nouvelle. C’est une procédure qui existait avant la loi immigration du 24 janvier. L’« urgence absolue » est décidée par le ministre de l’intérieur en vertu de l’article 26 de l’ordonnance du 2 novembre 1945 sur les conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France. « Le ministre de l’intérieur peut prendre un arrêté d’expulsion en urgence absolue en dérogation des procédures habituelles. Cela supprime toutes les garanties et dans les faits, cela empêche de faire un recours », détaille Serge Slama, professeur de droit public à l’université de Grenoble-Alpes et spécialiste du droit des étrangers.

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