Le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, durant une opération « Place nette XXL » contre le trafic de drogue, à Roubaix (Nord), le 25 mars 2024.

Le plan de bataille a été scotché sur le capot d’une voiture de police garée dans une rue de Roubaix (Nord) aux façades de brique rouge. Devant un auditoire de gradés et de caméras de télévision, le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, joue au général de campagne, posté devant cette carte de l’agglomération lilloise surmontée du titre : « Opération “Place nette XXL” dans le Nord ». L’ancien maire de Tourcoing (Nord) est familier du territoire. L’opération du jour a commencé quelques heures plus tôt, lundi 25 mars, dès l’aube, sur plusieurs points de deal de Lille, de Roubaix et de Tourcoing.

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Le commissaire Thierry Courtecuisse est au rapport. Le directeur interdépartemental de la police dans le Nord souligne qu’en cette fin de matinée déjà « 75 % des objectifs ont été atteints », avec 74 interpellations, ainsi qu’une saisie de 500 grammes d’héroïne, de quatre armes et de 70 000 euros d’avoirs. L’opération, qui mobilise plus de 900 agents, « a été préparée dans le plus grand secret pendant plusieurs mois », précise le ministre. Selon nos informations, les lieux, les objectifs comme le volume des interpellations ont été décidés au sein même du cabinet de M. Darmanin, une pratique qui fait tousser dans les parquets locaux, théoriquement chargés de conduire l’action pénale.

Sur la carte posée sur le capot, des pictogrammes figurent les objectifs prioritaires. Des silhouettes de bagnards symbolisent les individus à interpeller – ils sont 850 attendus par le ministère, à travers la France. Des feuilles de cannabis vertes localisent les points de deal à éradiquer ; des maisonnettes stylisées, les commerces à contrôler – au total, 59, comme le numéro du département.

Tests salivaires

Le volet lillois de ces opérations antistupéfiants, largement médiatisées, ratisse plus large que les substances illicites. Selon la préfecture et les responsables de la gendarmerie, elles ont aussi permis de mettre au jour des affaires de vols de véhicules, de cambriolages, d’incivilités diverses (graffitis…), ainsi qu’un « trafic d’animaux exotiques » – la découverte de plusieurs servals. « Une bonne manière de gonfler artificiellement le bilan de ces opérations », ironise un commissaire de police, « pas hostile à la méthode, à la condition d’occuper le terrain plus longtemps, en coordination avec les élus et les acteurs sociaux ».

Lundi matin, Gérald Darmanin n’a pas eu à partager l’affiche avec le ministre de la justice, Eric Dupond-Moretti, ou Emmanuel Macron, invité de dernière minute à Marseille, le 19 mars. Une façon de reprendre à son compte ce moment politique des « places nettes », qui scande aussi les dernières semaines avant les élections européennes du 9 juin. Le ministre de l’intérieur en a profité pour dévider son argumentaire, notamment son intention de se montrer, grâce à des évolutions législatives, « plus dur avec les consommateurs », qu’il considère « souvent issus de la classe bourgeoise ». En visite à Lyon, vendredi 22 mars, il avait évoqué la possibilité d’autoriser les forces de l’ordre à pratiquer des tests salivaires sur la voie publique afin de verbaliser les consommateurs.

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